Membres

Isadore Sharp


Récipiendaire du Prix Horatio Alger en 2013 — Fondateur et président du conseil, Four Seasons Hotels and Resorts

« Allez-y avec votre coeur parce que si vous vous sentiez bien par rapport à ce que vous faites, vous le ferez bien. »

Isadore Sharp, troisième de quatre enfants et seul garçon de sa famille, est né en 1931 à Toronto. Ses deux parents étaient des immigrants de la Pologne. Ils vivaient dans un ghetto juif où ils ont loué plusieurs maisons pendant la jeunesse d’Isadore. Au moment où il a atteint l’âge de 16 ans, il avait déjà déménagé avec sa famille 15 fois.

Le père d’Isadore Sharp était plâtrier de formation et travaillait principalement dans la construction. « Mon père travaillait très fort », dit Isadore Sharp. « Je me souviens d’une fois où il creusait un sous-sol avec l’aide d’un cheval et d’une charrue parce qu’il n’avait aucun équipement mécanique. Il s’est cassé l’épaule en le faisant, mais a continué à travailler sans relâche. Il était un homme discret et la personne la plus tolérante que j’aie connue, ne jugeant jamais personne et acceptant toujours les revirements de la vie avec sérénité. Max était très doux et ne levait jamais la voix ou la main devant nous; il n’avait pas besoin de le faire, car son approche calme commandait le respect. »

La mère de M. Sharp est arrivée à Toronto lorsqu’elle avait 16 ans. Son frère, qui avait immigré avant elle, avait arrangé les choses pour qu’elle marie le père d’Isadore, Max Sharp. Initialement, elle ne voulait rien savoir. « Ma mère avait sa propre idée », dit Isadore Sharp. « Mais mon père a fini par la conquérir, et leur amour n’a jamais cessé. Mes parents ont tous les deux vécu de longues vies, mais ma mère est morte la première. Après qu’elle soit décédée et transportée hors de la chambre d’hôpital, mon père a dit : « Regarde-la, n’est-elle pas magnifique ? »

Isadore Sharp décrit sa mère comme l’opposée complète de son père. « Elle était la chef de la famille », dit-il, « et elle régnait avec une main de fer. Mais mes parents ont nourri en nous une confiance et une estime de soi saine. Ils nous ont enseigné l’importance de la famille et mes sœurs et moi avons appris nos valeurs et nos principes pas tant par ce que mes parents disaient, mais par ce qu’ils faisaient. »

La famille Sharp vivait comme des immigrants typiques, travaillant fort pour rapidement gagner leur vie et avancer. Le père d’Isadore Sharp bâtissait une maison dans laquelle la famille emménageait, puis il la vendait et ils déménageaient dans une maison louée ou chez des membres de la famille. « Nous n’avions pas beaucoup d’argent », dit M. Sharp, « mais nous avions toujours un endroit pour dormir – même si nous étions trois par chambre. Je me souviens d’une fois où nous avions vendu notre maison et que ma mère avait appelé sa sœur pour lui dire que nous devions aller s’installer chez elle pour quelques temps. Nous étions une famille de quatre enfants avec un chien, et ma tante avait quatre enfants et un chien dans une maison à trois chambres avec seulement une salle de bain. Ma mère n’a pas demandé si nous pouvions y aller, nous y sommes tout simplement allés en sachant que sa sœur accepterait. Nous avons vécu là pendant environ six mois. Nous nous attendions à ce qu’ils nous aident, et ils l’ont fait sans poser de questions. C’est ainsi que les familles immigrantes ont survécu. »

Garçon, Isadore Sharp était grandement attiré par le sport et est devenu un bon athlète, mais il a dû commencer à travailler à un jeune âge. Son premier emploi consistait à vendre le magazine Liberty par porte-à-porte alors qu’il n’avait que huit ans. Quelques années plus tard, il a fait des livraisons à bicyclette pour une pharmacie locale. Un été, il a placé les quilles dans les allées d’une salle de quilles. Adolescent, il a passé chaque été à travailler dans un restaurant à la plage. Mais comme son père travaillait dans la construction, il avait la chance de suivre ses pas, étant donné qu’Isadore n’avait aucun réel désir d’emprunter un parcours professionnel différent. Et avec son talent athlétique, il aimait le travail physique et la construction. Après l’école secondaire, Isadore Sharp est allé au Ryerson Institute of Technology, où il a obtenu un diplôme en architecture en 1952, s’est vu remettre la médaille d’argent pour sa performance académique et a également été nommé athlète de l’année.

« Je n’avais aucune intention de devenir architecte », dit M. Sharp. « Je suis allé à Ryerson parce que je croyais que cela m’aiderait dans le domaine de la construction. Mon père m’a grandement aidé en me donnant la responsabilité complète de mes projets. Il a compris que vous devez laisser l’espace aux gens pour qu’ils deviennent ce qu’ils peuvent être. J’ai aimé la construction et je suis lentement devenu bon. »

Tôt dans sa carrière dans la construction, alors qu’il avait 25 ans, un ami d’Isadore Sharp lui a demandé de bâtir un petit motel en périphérie de la ville. Il s’agissait d’un motel de 14 chambres qui ressemblait à une grande maison. M. Sharp se souvient : « J’ai suggéré de doubler la superficie, mais de finir seulement l’extérieur de l’autre moitié, puis d’installer un grand signe sur le toit du motel qui pourrait être vu de l’autoroute avoisinante. J’ai vite eu à finir les chambres additionnelles parce que les affaires roulaient. J’ai commencé à croire qu’il serait intéressant de voir ce qui arriverait si l’on combinait le concept d’un motel-hôtel au centre-ville. Ce serait un endroit qui aurait la commodité d’un motel tout en possédant certains aspects d’un hôtel. »

M. Sharp était alors marié et peinait à gagner sa vie en construisant des maisons. Au cours des cinq années suivantes, il a utilisé son temps le soir pour convaincre des investisseurs potentiels de la validité de son concept de motel-hôtel. Une ouverture s’est présentée à M. Sharp lorsque le prêteur immobilier avec lequel il travaillait pour financer ses projets de maisons lui a dit que s’il pouvait lever 50% du financement pour son projet d’hôtel, il donnerait à M. Sharp l’autre 50%.

M. Sharp a dû faire preuve de beaucoup de persévérance et surmonter plusieurs rejets avant d’atteindre son objectif. Finalement, en 1958, il a acheté un terrain situé dans le quartier chaud de Toronto, ce qui le rendait abordable. Même si le quartier était défavorisé, M. Sharp pensait qu’il s’agissait d’un bon emplacement parce qu’il était près de l’aréna et du centre-ville de Toronto. Il a construit 125 chambres faisant face à une cour intérieure pour enlever à l’aspect miteux du quartier. L’établissement a ouvert ses portes en 1961 et a connu un succès immédiat.

Isadore Sharp a rapidement réalisé que les gens fréquentant son hôtel appréciaient la cour et la piscine, ce qui l’a amené à penser à sa propriété suivante. Il voulait qu’il s’agisse d’un complexe hôtelier en plein cœur de la ville. M. Sharp dit : « L’aménagement paysager joue un rôle important dans la création d’un environnement. Alors qu’un édifice vieillit, l’aménagement paysager s’améliore. C’est ainsi que j’ai créé le Four Seasons : une architecture de belle apparence avec un aménagement paysager la complémentant. »

M. Sharp a construit son troisième hôtel, le Inn on the Park à London, en 1970, et c’est le succès de ce projet qui a consolidé sa carrière de propriétaire et développeur d’hôtels. Aujourd’hui, Four Seasons Hotels and Resorts inclut 91 propriétés dans 36 pays, avec plus de 60 en développement, le plaçant sur tous les continents, hormis l’Antarctique. En 2007, la compagnie est devenue privée pour 3,4 milliards $ et Isadore Sharp est demeuré président du conseil et PDG. En 2009, il a écrit un livre, Four Seasons: The Story of a Business Philosophy, qui détaille l’histoire et la philosophie de la compagnie.

D’un point de vue personnel, M. Sharp accorde le crédit de son succès à ses parents, qui lui ont donné un système de valeurs et une confiance en lui qui lui ont permis de développer son plein potentiel. Il dit : « Mes parents ne connaissaient pas les mots de la règle d’or, mais ils ont vécu en la respectant. C’est ainsi que les valeurs s’implantent : vous apprenez non pas nécessairement par ce que vos parents disent, mais par ce qu’ils font. »

Isadore Sharp s’est fié à ses valeurs d’enfance lorsque le troisième de ses quatre fils a contracté le cancer à l’âge de 17 ans. « On lui avait donné seulement 2% de chances de survie », dit M. Sharp. « Sa mort a été difficile pour nous tous, mais ma femme Rosalie et moi avons juré que nous ne laisserions pas cette tragédie nuire à la famille entière ou à notre relation. Nous avons décidé de porter notre fardeau et non de mettre ce fardeau sur nos autres enfants. C’est ainsi que vous faites fonctionner les choses, mais vous n’oubliez jamais. À ce jour, je récite une prière à tous les matins pour mon fils. »

Isadore Sharp évalue son succès davantage en fonction des vies des gens qu’il a touchées et aidées que des possessions matérielles. Le Four Seasons emploie 35 000 personnes et il éprouve beaucoup de fierté à savoir que son entreprise a enrichi la vie de tant de personnes.

Isadore Sharp est souvent invité à parler aux jeunes. Son conseil est d’obtenir le plus d’éducation possible. « Après cela », dit-il, « laissez votre passion être votre guide. Suivez votre cœur parce que si vous aimez ce que vous faites, vous le ferez bien. Je dis aussi aux jeunes de ne jamais utiliser le mot « si » comme dans « j’aurais mieux réussi si… ». Faites toujours de votre mieux et il n’y aura pas de « si ». Il n’y a pas d’excuse. »

Trouver un Membre